Souvenirs tissés de ma sœur Germaine,

récits de Marie-Jeanne Langrognet-Delacroix,

ouvrage paru chez Astérion

Merci à Françoise Urban-Menninger et au Pan poétique des muses (http://www.pandesmuses.fr) pour ce bel article.

La couverture de ce livre illustrée par un tableau de William Bouguereau (1882) qui représente deux fillettes jouant avec des noisettes évoque d’emblée la musique nostalgique d’un temps révolu mais que l’auteure ressuscite avec bonheur dans des souvenirs qu’elle tisse avec des mots choisis, ceux du cœur et de l’esprit.

L’on songe immanquablement au philosophe Gaston Bachelard qui assurait que « l’enfance réelle et permanente vit en nous ».

Ce passé lointain, Marie-Jeanne Langrognet-Delacroix nous le rend proche tant les émotions sont perceptibles et tangibles. L’épisode qui met en scène Sœur Sainte Placide à l’école primaire d’après-guerre où la mixité n’existait pas, nous remémore que l’on séparait les filles et les garçons à cette époque. De surcroît, bon nombre de fillettes avaient pour enseignantes des sœurs même à l’école publique. C’est cet univers que la plume de l’auteure retrace en exhumant des souvenirs qui ont partie liée avec sa sœur aînée Germaine qu’elle qualifie de « Rebelle née ».

Encore très vivace, le sentiment d’injustice renaît entre les lignes quand l’auteure, accusée à tort, réaffirme son innocence et s’exclame avec force et vigueur « Non, je n’avais pas soufflé » ! Et de glisser dans cet épisode une pique acerbe à l’endroit de Sœur Sainte Placide « Notre brave religieuse de Maîtresse était bien plus rouée qu’on ne croit ».

Au fil de ces récits, le lecteur ne peut s’empêcher d’éprouver de l’empathie pour ces fillettes, puis ces adolescentes dont le coup de foudre pour Luis Mariano, l’attrait de la coiffure « à la Brigitte Bardot » prêtent à sourire en songeant à sa propre jeunesse…

L’histoire, sans conteste la plus touchante, voire bouleversante, nous renvoie au mariage de la narratrice et à l’évocation de la mère décédée un an plus tôt lorsqu’elle s’adresse à sa sœur qui arrange sa coiffure : « Je lui dis alors que Maman, à son mariage, portait une couronne de fleurs d’oranger. Les mains de ma sœur se mirent à trembler. Elle commençait à se sentir très émue. Et je l’étais aussi car ce matin-là, ne remplaçait-elle pas en quelque sorte, notre pauvre maman morte l’année précédente ? »

Nul doute que Marie-Jeanne Langrognet-Delacroix nous offre la part belle d’une relation « tissée » par-delà les mots avec sa sœur disparue. Cet ouvrage lumineux redonne vie non seulement à un monde d’un autre âge mais lui apporte aussi une dimension intemporelle et universelle… On a envie de parodier la dernière phrase du livre prononcée lors du mariage de l’auteure par son père : « Si seulement ta maman pouvait te voir » et suggérer « Si seulement votre mère et votre sœur pouvaient vous lire »….

Françoise Urban-Menninger

Source : http://www.pandesmuses.fr/no8/fum-souvenirstissesrecits

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